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La nativité

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5ème catéchèse du 02/01 2022

Le sens de la fête de Noël (ou Nativité), c’est l’actualisation, chaque année dans notre cœur, de ce grand mystère qu’est le mystère de l’Incarnation c’est-à-dire de Dieu Qui, par son Fils, devient le fils de l’homme ; pourquoi devient-Il fils de l’homme ? Pour ce que l’on appelle notre salut c’est-à-dire le rétablissement de la communion plénière, totale, entre Dieu et l’homme, mais nous en avons déjà souvent parlé et le salut n’a pas, faut-il encore le répéter, dans l’Eglise orthodoxe, de caractère juridique, « légal » mais il s’adresse au cœur de l’homme.

On peut dire que le Messie est le premier parmi tous les pauvres d’hier, d’aujourd’hui et de demain. Pourquoi ? Parce qu’Il a renoncé volontairement à Sa nature divine pour vivre parmi nous, pour notre salut ; Il S’est « anéanti » jusqu’à devenir un petit enfant sans défense , couché sur la paille d’une étable, aux pieds des animaux qui s’y trouvaient, Lui le Créateur de tous les mondes ! Et le saint apôtre Paul l’écrit très bien dans son épitre adressée à la communauté de Philippe qu’il a fondée, en Grèce : « Lui, de condition divine, ne retint pas jalousement le rang qui l’égalait à Dieu le Père mais Il S’est anéanti Lui-même en prenant la condition d’esclave, devenant ainsi semblable aux hommes (Ph. 2, 6 -7).

D’ailleurs, dès que le Christ nait, le roi Hérode cherche à Le tuer et Sa famille nourricière (Joseph et Marie) fuira en Egypte.

Regardons l’icône de cette fête et relisons les 2 récits de la Nativité du Christ (Mt 1,18 – 25 ; 2, 1 – 18) et Lc (2, 1 – 21) ; d’abord tout est en fête, tout est paisible ; les astres rayonnent dans les cieux, les rochers semblent s’ouvrir pour accueillir leur créateur, les animaux sont pacifiés et les bergers partagent leur joie avec les anges et les mages galopent joyeusement vers le Sauveur du monde ; tout baigne dans une lumière qui a un éclat particulier, elle semble d’origine céleste, semblable à celle de la Transfiguration qui enveloppa les apôtres sur le mont Thabor (Lc 2, 9).

Toute la composition picturale de l’icône est, en fait, centrée sur la grotte et c’est vers elle que tout converge ; elle est comme une spirale dont le point central serait ce trou sombre d’où luit la lumière (« la lumière brille dans les ténèbres et les ténèbres ne l’ont point comprise », Jn 1,5). Jésus est au creux de la grotte comme s’Il était issu de la grotte elle-même (Son Incarnation) car Il a pris notre condition humaine et comme le dit encore l’apôtre Paul : « si le 1er homme (Adam) issu du sol est terrestre, le second homme (le second Adam de l’apôtre Paul) Lui, vient du Ciel, c’est le Christ ; et de même que nous avons revêtu l’image terrestre, il nous faut désormais revêtir l’image du céleste » (1Co 15, 47, 49). Et si le Christ est descendu du Ciel jusqu’au creux de la terre puis, après Sa mort sur la Croix, jusqu’aux tréfonds des enfers, c’est pour que nous ressuscitions avec Lui à la fin des temps. Ainsi, au moment de cette grande fête, fondamentale pour le salut de l’humanité, une profonde joie nous envahit car Dieu est avec nous (Emmanuel !), car Il est devenu un homme comme nous !

Le Ciel dont il est question ne doit pas être confondu avec le firmament (c’est-à-dire la limite humaine possible de la vision de l’espace par l’homme) créé par Dieu le 1er Jour de la création (Gn 1,6) ; le Ciel qui est évoqué n’est pas un lieu, un espace, il n’est pas localisable ; dans les Actes des apôtres où l’Ascension de Jésus est relatée, les apôtres regardent le ciel et les anges leur disent : « hommes de Galilée, pourquoi restez-vous ainsi à regarder le ciel (Act 1 ?11) ; le Ciel est en fait la présence de Dieu, le rayonnement de Sa gloire où Le Père et le Fils et le S .E. règnent de toute éternité.

Devant la grotte, Marie est allongée dans la position habituelle d’une femme qui a accouché et sa personne occupe tout la partie centrale de l’icône, pourquoi ? Parce qu’elle est très importante dans le mystère de l’Incarnation et, par la naissance de son fils, elle est devenue Mère de Dieu, Theotokos, autrement dit celle qui enfante Dieu, qui porte Dieu dans son sein ; elle n’est pas Mère de Dieu au sens où certains l’entendent de façon simpliste comme si Dieu avait une mère, mais Marie s’est unie à Dieu en devenant Sa Mère !

On s’étonne aussi que Marie semble tourner le dos à l’enfant ; en réalité elle regarde Joseph avec compassion car il est dans le doute et avec lui, toute l’humanité ; car Joseph a un doute sur la virginité de Marie et donc sur l’origine divine de Jésus ; Joseph se trouve en bas de l’icône, assis, comme accablé, la tête dans ses mains et on le voit tenté par démon du doute qui se trouve à côté de lui.

Également la main de Marie désigne le nouveau-né et, par ce geste, elle guide l’humanité vers son fils, le Sauveur du monde ; elle L’a mis au monde pour le salut du genre humain et c’est là l’origine de sa joie et non un sentiment de fierté maternelle ; également, la main de Marie, tout en montrant l’enfant, reste posée sur sa poitrine, comme si l’iconographe voulait faire allusion aux paroles de l’évangéliste (Lc 2,19) quand Marie conservait avec soin tous les paroles qu’elle avait entendues et les méditait dans son cœur .

L’évangéliste Mathieu passe rapidement sur la naissance de Jésus à Bethléem et relate la visite des mages qui se trouve développée dans un tropaire de la fête ; ce sont des personnages de haut rang, à la recherche du roi des Juifs ; ils représentent les maîtres de la science antique et, à l’époque de Moïse, une prophétie avait été annoncée aux ennemis d’Israël afin de révéler à eux aussi le Messie ; Balaq, roi de Moab prit peur devant le nombre et la force du peuple juif et il fit venir le devin Balaam ; celui-ci, bien que tout-à-fait étranger à Israël, reconnaissait et servait le vrai Dieu ; le roi Balaq demanda donc à Balaam de maudire Israël afin de lui faire perdre le combat qui devait avoir lieu contre son armée mais Balaam, contre toute attente, prononça 3 bénédictions sur Israël puis il prophétisa et rendit hommage au descendant de Jacob : « Je le vois (…) un arbre issu de Jacob devient chef, un sceptre, un roi se lève, issu d’Israël » (Nb ch. 22, 23 et 24) et en particulier le verset 17 de ce chapitre 24. On peut reconnaître Balaam comme l’ancêtre des mages et cela nous montre que le Messie est attendu aussi en dehors d’Israël comme le dira d’ailleurs le vieillard Syméon quand il verra l’enfant Jésus présenté au Temple, amené par ses parents nourriciers, comme cela se fait dans la tradition d’Israël ; inspiré par le S.E. Syméon dira : « Et maintenant Seigneur, laisse ton serviteur (Syméon) s’en aller en paix car mes yeux ont vu le salut (le Christ) qui vient de Toi, que Tu as préparé pour être mis à la face de tous les peuples, Lumière Qui doit Se révéler aux nations et gloire de ton peuple, Israël (Lc 2, 30-32)»

Autrement dit, Dieu ne change jamais d’attitude vis-à-vis des hommes étrangers à la foi, Il attend que leur cœur s’ouvre afin de leur faire le don de la foi ; également, ceux qui ont déjà reçu ce don, les chrétiens, car la foi est un don et non une acquisition de l’homme, l’homme doit surtout répondre à la foi que Dieu lui donne, les chrétiens n’ont pas pour vocation de garder jalousement cette révélation du Dieu-homme, du Messie, du Christ, dans l’enceinte de l’Eglise mais, au contraire, de témoigner dans leur vie personnelle, de Sa venue, de Sa passion, de Sa mort et de Sa résurrection pour le salut de tout le genre humain.

Ce que l’on peut déjà retenir, c’est qu’il a fallu aux mages savants et érudits, une longue et laborieuse recherche pour arriver jusqu’au fils de Dieu alors que les bergers, gens simples de cœur mais intelligents, car l’intelligence n’a rien à voir avec l’érudition, ont reçu, sans complication la bonne nouvelle de l’Incarnation directement d’un ange.

L’évangéliste Luc, toujours à sa manière, situe avec précision, l’Incarnation du Sauveur dans l’histoire de l’humanité : l’édit de César Auguste, le recensement, le nom du gouverneur de Syrie de cette époque puis il situe les principaux personnages dans l’espace géographique : Joseph et Marie qui se déplacent de la Galilée à Bethléem pour venir se faire recenser car ils sont de la tribu de Juda laquelle est issue de la Maison de David et, de façon providentielle, où Jésus va naître à Bethléem (« la ville du pain »), ville d’où était originaire le roi David lui-même ; Jésus est « l’oint » du Seigneur (Messie en hébreu, Christos en grec), Il est, selon la prophétie de Michée (tout le chapitre 5), Roi d’Israël et « fils », selon la nature humaine, de David.

Également Luc représente la naissance de Jésus dans la campagne puisqu’il y a le voisinage des bergers ; pour Luc, Jésus ne nait pas dans une étable mais dans une grotte avec une mangeoire car les bergers se servaient de grottes pour parquer leurs troupeaux et s’abriter eux-mêmes. Luc ne mentionne pas non plus l’âne et le bœuf mais la logique supplée à son récit : Joseph a mis Marie et Jésus sur un âne au moment de leur fuite en Egypte et la crèche était remplie de foin ce qui suppose qu’il y avait des animaux ; mais si l’âne et le bœuf sont sur l’icône c’est pour rappeler la prophétie d’Isaïe : « le bœuf reconnait son bouvier et l’âne la chèche de son maître, Israël ne reconnait rien et mon peuple ne comprend rien (Is 1, 3).

C’est toute la conversion du peuple juif, de nos jours, car ils attendent toujours le Messie sauf ceux qui l’ont déjà reconnu dans Jésus et que l’on rencontre dans toutes les confessions chrétiennes, en particulier orthodoxe et catholique et l’on sait que l’un des signes de la fin des temps sera la conversion massive du peuple juif à la foi chrétienne.