Pour un certain nombre de théologiens catholiques contemporains, l’Église orthodoxe est l’église qui est la gardienne de la foi apostolique et de la Tradition de l’Église des Premiers siècles et cela, dans son intégralité.
C’est d’ailleurs pour cette raison que l’église orthodoxe considère les autres églises chrétiennes comme des parties de l’Eglise qui, au cours des siècles, se sont détachées de l’Église primitive, dont la représentation contemporaine est l’Église orthodoxe.
On peut dire ainsi que l’Eglise orthodoxe a préservé, dans toute son intégrité, l’enseignement du Christ et de Ses apôtres.
Il faut toujours se souvenir que la foi que nous confessons influence profondément notre mode de vie, (sinon quelle est notre foi?) et la spiritualité qui en découle et les altérations de la foi apostolique ont eu, de ce point de vue, beaucoup de conséquences négatives sur la vie des chrétiens.
Ce sont ces altérations et déviations de la foi originelle qui ont entraîné ces ruptures de communion entre les églises même si, les points communs fondamentaux de la foi se sont maintenus.
Ainsi, «certains éléments fondamentaux qui fondent la plénitude de l’Eglise, font défaut dans les communautés séparées (catholique, réformée, évangélique, etc…)» (conf. «l’église orthodoxe hier et aujourd’hui » d’O. Clément, p. 179), c’est pourquoi, l’Église orthodoxe ne cesse d’appeler les autres églises chrétiennes à un retour renouvelé à la foi apostolique et patristique de ceux qui nous ont précédés.
I) Divergences de l’Église orthodoxe avec les Églises dites «orientales», c’est-à-dire «non chalcédoniennes».
Ces églises sont de 2 types:
a) les églises dits «nestoriennes», (ou églises des 2 conciles), car elles n’ont pas reconnu les grands conciles ultérieurs (du 3ème au 7ème);
1. L’Église apostolique arménienne implantée historiquement en Turquie orientale (région de Halkari). Un grand nombre de ses fidèles ont été assassinés lors des grands massacres qui ont eu lieu au moment de la 1ère guerre mondiale et les fidèles restants se sont dispersés à travers le monde.
2. L’ancienne Église d’Orient (ou Église chaldéenne), issue d’un schisme avec la précédente, en 1964, et désormais rattachée à l’Église catholique romaine; elle est située dans le nord de l’Irak. Ils ont subi beaucoup de persécutions depuis la récente déstabilisation de la région, provoquée par l’état islamique.
b) les église dites «monophysites» (ou églises dites des 3 conciles); elles n’ont pas, elles aussi, reconnu le concile de Chalcédoine ainsi que les autres grands conciles ultérieurs (du 4ème au 7ème).
Ce groupe comporte 2 grands types d’églises:
1. les église dites «coptes» (égyptienne, éthiopienne, érythréenne et arménienne).
2. l’église syrienne jacobite, (présente en Syrie et sur la côte occidentale des Indes).
Contrairement aux églises précédentes, l’Église orthodoxe a toujours eu, avec ces 2 types d’églises, depuis le concile de Chalcédoine (451), un dialogue régulier.
Quel est le problème qui empêche l’union de ces églises avec les églises orthodoxes? Le Christ, selon la définition du Concile de Chalcédoine, est le Verbe incarné, c’est-à-dire le Christ, Dieu devenu homme, pleinement.
Il a donc, 2 natures, une divine bien sûr et une humaine qu’Il a pris au moment de Sa conception humaine.
Il a donc, de ce fait, 2 libertés et 2 volontés, unies, une divine et une humaine.
Pour les Églises non chalcédoniennes, la nature divine du Christ est tellement forte que sa nature humaine en est amoindrie ce qui aboutit au fait que les volontés divine et humaine dans le Christ sont déséquilibrées et que la volonté proprement humaine du Christ se soumet à sa volonté divine et ainsi, sa volonté humaine n’est pas totalement libre.
Il y a également la question des concepts de «nature» et d’«hypostase» qui ne sont toujours pas très clairs.
Sur le fond, aujourd’hui, il s’agit d’apprécier les écrits de certains théologiens pré-chalcédoniens sur ces questions, lesquels sont toujours vénérés comme des saints dans ces églises, ce qui pose des problèmes qui semblent insolubles.
II) Divergences avec l’Église catholique romaine.
S’il faut bien reconnaître que la rupture doctrinale entre l’occident et l’orient chrétiens a été favorisé par un éloignement culturel incontestable mais aussi pour des raisons géopolitiques, en particulier par l’action de Charlemagne et de ses successeurs, les rois carolingiens, cela ne suffit pas pour justifier la rupture qui se concrétisera en 1054.
Un certain nombre de divergences s’étaient déjà révélées, de façon aiguë, au cours du 9ème siècle, lesquelles s’étaient déjà traduites, de façon épisodique, par des ruptures temporaires de communion qui furent relativement nombreuses, au cours des siècles précédents, au cours ce premier millénaire.
Dans son livre, intitulé «le schisme byzantin», l’historien et théologien catholique Martin Jugie, rapporte qu’entre la mort de l’empereur Constantin, en 337 et le 7ème concile oecuménique en 843, caractérisé par le triomphe de la foi intègre, il n’y a eu pas moins de 217 années durant lesquelles les 2 grandes églises auraient été en rupture ouverte!
Ensuite, et jusqu’à notre époque, il y eut un ensemble de divergences caractérisées mais les 2 plus importantes se sont traduites au 11ème siècle, par une divergence d’ordre doctrinal, c’est-à-dire dogmatique, et une divergence d’ordre ecclésiologique, c’est-à-dire lié à la vie de l’Église.
A) La divergence dogmatique fondamentale, «le Filioque».
Il s’agit de l’adjonction de la préposition «ET» du Fils («Filioque» en latin), concernant la procession du Saint-Esprit Qui, selon le credo de Nicée-Constantinople, confessé unanimement par toute les Églises en 381, ne procède que du Père seul et non du Père ET du Fils.
Cette interpolation (ajout) fut d’abord introduite au 3ème concile local de Tolède en 589, comme une façon maladroite d’affirmer, face à l’hérésie arienne, l’égalité de nature entre le Père et le Fils et cette divergence, dans un cadre strictement local, passa presque inaperçue.
Mais cela ne fut plus le cas lorsqu’elle fut introduite en 809, au concile d’Aix la Chapelle, diligenté par Charlemagne, qui cherchait à retrouver la puissance de l’occident chrétien, dans un but éminemment politique, et d’affirmer ainsi son indépendance face à l’empereur de Byzance.
Dans un 1er temps, les papes de Rome résistèrent très fortement face à cette «innovation» doctrinale fausse, promue par Charlemagne et ses successeurs qui voulaient l’imposer, non seulement à toute l’église latine mais même au-delà et les papes qui suivirent ceux qui avaient vaillamment résisté aux pressions des carolingiens furent contraints de céder à la pression impériale.
C’est une fois que le Filioque fut «adopté», plutôt imposé à l’occident, que les «théologiens» «à la solde» des carolingiens, s’efforcèrent de lui trouver des justifications doctrinales, ce qui aboutira, plus tard, à la théologie «scolastique» (théologie d’école).
L’ Église orthodoxe, fidèle au concile de Nicée-Constantinople mais également au texte du Nouveau Testament (Jn 15, 26) et à toute la tradition patristique continuera de confesser que si le Saint-Esprit peut Se manifester par le Fils, Il ne procède que du Père seul.
B) La divergence ecclésiologique fondamentale, le papisme.
Elle concerne la façon autoritaire, non synodale, dont l’évêque de Rome considère sa fonction, non seulement à l’intérieur de son église mais également vis à vis des autres églises non catholiques romaines.
La primauté d’honneur «historique» de l’évêque de Rome, du fait que Rome était la capitale initiale de l’empire romain, s’est transformée, au cours des siècles, et sans aucune justification théologique et ecclésiologique, en une primauté de droit canonique, juridique.
Le renforcement, au cours du second millénaire, de cette conception erronée, aboutira, à la fin du 19 ème siècle, au dogme de l’infaillibilité du pape de Rome, (infaillibilité pontificale) qui lui confère, selon l’église catholique, un statut exceptionnel, le plaçant au-dessus de tous les autres évêques de toutes les églises mais également au-dessus de toutes les décisions des conciles œcuméniques et, d’une certaine manière, au-dessus de l’Église toute entière.
C) Les divergences concernant les questions liturgiques.
. L’usage, à partir du 9ème siècle, du pain sans levain (pain azyme).
Symboliquement, le levain symbolise la vie dont le Christ est porteur alors que le pain sans levain est un pain «mort».
. La consécration, à partir du 12ème siècle, de pains (hosties) sans levain, différents et de dimensions différentes pour le prêtre célébrant et les autres (concélébrant et fidèles).
Un seul pain représente l’unité du Corps du Christ; car «le pain que nous avons rompu n’est-il pas participation au corps du Seigneur? Quoique nombreux, nous ne sommes qu’un seul pain, qu’un seul corps, nous qui participons à un pain unique» (1Co 10, 16- 17) suivant en cela l’exemple du Christ Qui a consacré un seul pain pour le distribuer à Ses apôtres (Mt 14, 22).
. Egalement, durant l’anaphore (offrande) eucharistique, l’absence d’«épiclèse», dans la messe latine, c’est-à-dire la prière de demande au Père céleste, par une prière spécifique, faite par le célébrant, que le Saint-Esprit descende sur les dons offerts par l’Assemblée liturgique afin que ceux-ci soient pleinement consacrés. Il s’agit là, d’une modification qui a été apportée en occident, à partir du 8ème siècle, qui fait que, pour l’Église orthodoxe, le Saint-Esprit ne descend pas sur les dons offerts et à cause de cela, les offrandes ne sont pas pleinement consacrées.
. Par ailleurs, la conception développée par les liturgistes catholiques romains, affirmant que c’est le prêtre célébrant «in personna Christi» (à la place du Christ) qui accomplit la consécration en prononçant le paroles du Christ «Ceci est Mon Corps» puis «Ceci est Mon Sang» alors que pour l’Eglise orthodoxe, c’est bien le Saint-Esprit Qui est l’acteur de cet immense Mystère et non le prêtre!
Le prêtre est, bien sûr, le nécessaire médiateur, mais seulement le médiateur.
D) Les divergences plus tardives.
.La notion de Purgatoire.
Cette «innovation» apparue au 12ème siècle n’est pas conciliable avec l’ensemble de la Tradition patristique mais aussi avec l’Écriture Sainte puisque le Christ Lui-même dans son évocation du monde de l’au-delà le confirme clairement: entre le Ciel (le sein d’Abraham) et l’enfer (l’Hadès), il n’y a qu’un abîme! (Luc 16, 19-31) et aucun lieu «intermédiaire».
. Le dogme de l’Immaculée Conception.
Lorsque la Vierge est apparue à Bernadette Soubirous, à Lourdes, ses paroles ne furent pas: «Je suis l’Immaculée conception» ou encore «Je suis celle qui a été conçue de manière immaculée» mais «Je suis celle qui a CONCU de manière immaculée»; mais, à partir du patois lourdais, le renversement sémantique était facile à faire!
Si Marie est immaculée au moment de sa conception, elle se trouve, de fait, placée dans un état supérieur à celui de l’humanité toute entière, dans un statut qui fait d’elle, une sorte de demi-déesse» justifiant une piété mariale particulière.
Le mouvement de la Réforme s’est, à juste raison, élevé contre cette déviation dogmatique mais avec excès, aboutissant alors à supprimer la légitime vénération qui est due à la Mère de Dieu car «Theotokos» en grec signifie non pas «Mère de Dieu» mais «celle qui porta Dieu» dans son sein.
Par ailleurs, cette déviation doctrinale implique que la Theotokos ait été conçue sans le péché ancestral, hérité d’Adam et Eve, ce qui aboutit à ce qu’elle n’a pas connu la mort comme tous les humains; c’est pour cela que l’Assomption ne peut être crédible, ce qui supposerait qu’elle ait été élevée aux Cieux avec son corps (dogme de l’Assomption décrété en 1950), sans que celui-ci ne soit passé par la mort (2ème exception donnée à Marie, après sa conception immaculée) alors que tous les humains, y compris le Christ sont passés par la mort.
Cette vision ne peut être que rejetée car le fait de ne pas être passée par la mort prive Marie d’une véritable humanité et diminue la valeur proprement humaine de sa disponibilité au message de l’archange Gabriel; pour l’Église orthodoxe, c’est la conception du Christ en Marie, par l’action du Saint-Esprit, qui est immaculée.
. Le dogme de l’infaillibilité pontificale, promulgué lors du concile Vatican I, en 1870) et confirmé en 1964, qui proclama, non seulement l’infaillibilité du Pape de Rome mais également sa primauté universelle, ce qui établit le fait que le pape ne peut se tromper dans son pouvoir ordinaire et extraordinaire lorsqu’il entend définir une doctrine révélée en matière de foi ou de mœurs et qu’il l’exprime «ex cathedra», au monde entier.
. La doctrine latine de la grâce créée.
Pour devenir saint, l’homme devrait se conformer à Dieu de façon morale (notion aristotélicienne de «l’imitation», une manière d’être).
Les successeurs d’Augustin d’Hippone , considérant que la volonté humaine était devenu infirme à cause du péché «originel» ont soutenu l’idée de l’action exclusive de la grâce et, plus tard, lors du concile de Trente (1545- 1563), en dehors de la question des indulgences et de la centralité de l’Église, en réaction au protestantisme, ont développé la thèse de la justification des œuvres «méritoires».
Ces 2 conceptions, «œuvres méritoires» et « grâce seule» (sola gracia), s’opposent à la vision synergique de la grâce divine unie à la liberté de l’homme, héritière de la tradition des pères grecs et de certains pères latins tels que St Grégoire le grand et st Jean Cassien.
Le concile orthodoxe de Constantinople de 1351 a reconnu le bien fondé de la distinction entre l’essence (ou nature) divine et les énergies de Dieu (énergies divines donc incréées), explicitées dans les écrits de St Grégoire Palamas et St Maxime le Confesseur, grands héritiers de tous les pères qui les ont précédés.
Cela veut dire que Dieu est connaissable (et donc participable) par ses énergies mais non dans sa nature car la créature humaine ne peut connaître la nature incréée de Dieu, Dieu étant transcendant en essence mais immanent par son action.
E) La vie sacramentelle.
Cette façon de considérer la question de la grâce ne pouvait que de susciter une façon différente de considérer la vie sacramentelle.
. concernant le sacrement de baptême.
Il est reçu, dans l’église latine, à partir de la fin du 13ème siècle, soit par «effusion», (de l’eau bénite est versée sur la tête du baptisé) soit par «aspersion», (la tête du baptisé est aspergée d’eau bénite) mais non plus par triple immersion, selon la pratique apostolique conservée dans l’Église orthodoxe.
. la dissociation, dès le 9ème siècle, de l’onction du St Chrême (sacrement de confirmation) du sacrement de baptême qui sera alors, le privilège des évêques.
. Concernant le sacrement eucharistique.
L’interdiction faite aux enfants, à partir du 12ème siècle, de communier, suite à un concile de l’Église latine qui s’est tenu à Bordeaux au 12ème siècle et qui s’est imposé à toute l’Église d’occident; quelles en sont les justifications théologiques et sacramentelles?
L’introduction, à partir du milieu du 13ème siècle, de la communion aux fidèles, uniquement sous l’espèce du pain azyme, alors que la pratique apostolique, à la suite du Christ, s’est toujours faite sous les 2 espèces, pain et vin (« prenez et mangez, buvez en tous »).
L’institution, dès la fin du 9ème siècle, de la pratique dite des «indulgences».
Qu’est-ce donc qu’une indulgence? Indulgere, en latin, signifie «accorder». Celle-ci entraînerait la rémission totale ou partielle, devant Dieu, d’un péché, qui s’obtiendrait en contrepartie d’un acte de piété, qui peut être une prière, une mortification, un pèlerinage, l’assistance à des messes ou encore une visite à des reliques, effectués dans un esprit de repentir pour des actes qui auraient été commis en contradiction avec la foi chrétienne.
Théoriquement, il n’y a pas de «proportion» entre le péché et l’acte de piété demandé et l’indulgence est censée être l’effet de la communion des saints mais dès le début, des abus se manifestent et l’indulgence, à partir du 11ème siècle, deviendra une arme pontificale, employée pour encourager en particulier, la croisade en Espagne, la Reconquista.
ll y aura ensuite, au 15ème siècle, des indulgences accordées aux âmes du Purgatoire et ces abus seront bien sûr dénoncés, d’abord par Jean Hus puis par le moine Luther. Car le pape Léon X pouvait, selon ce principe, en vertu de son autorité apostolique, concéder son indulgence pour les vivants comme pour les morts, distribuant «le trésor des mérites de J.C. et des saints» et «libérant la peine temporelle due, selon la justice divine pour leurs péchés».
Les abus continuant de se développer, la pratique des indulgences sera de plus en plus perçue comme une forme de corruption au cours du XVIème siècle. Luther dénoncera vigoureusement le principe même des indulgences, expliquant que les morts étant morts, ils ne peuvent plus être tenus par des décrets canoniques et, concernant les vivants, il affirme, à juste raison, que l’Église romaine profite de la peur de l’enfer pour pratiquer les indulgences.
Pour Luther, et à juste raison, seul le repentir et la charité valent la rémission des peines et l’indulgence détourne en fait tout pécheur de cette exigence chrétienne.
L’Église orthodoxe rejette complètement cette doctrine, de même que celle du Purgatoire car, les épitimies (actes pénitentiels demandés au pénitent) sont, de fait, des remèdes contre les péchés et non comme des compensations ou satisfactions qui seraient offertes à Dieu pour nos péchés car l’effet de la pénitence permet à celui qui la fait, de s’amender dans la vie présente mais elle ne peut être active au-delà de la tombe.
Et le Patriarche orthodoxe Dosithée II de Jérusalem dira très justement: «Dire que le péché serait remis mais que la peine est demeurée, est le propre de ceux qui plaisantent et non de ceux qui pensent sérieusement.» Ou encore, comme le rappelle le Métropolite Kristopoulos: «le fait de soutenir que les saints auraient des œuvres rigoureusement requises aux yeux de Dieu et d’autres superflues, par lesquelles ils pourraient sauver beaucoup de pécheurs, est inconvenant; comme si les œuvres surabondantes des saints pouvaient être proposées à l’achat de certains, comme des légumes! C’est une véritable insulte faite à l’Église (…).
Dans le catéchisme de l’Église catholique de 1992 (§ 1471 à 1479), celle-ci réaffirme son droit à octroyer des indulgences, «en vertu du pouvoir de lier et de délier qui lui a été accordée par le Christ Jésus et elle rappelle, à nouveau, que l’indulgence est accordée au pécheur non pas en vertu de ses pénitences seules mais de la communion des saints. Le catéchisme recommande toujours, avec l’aumône et les œuvres de pénitence, l’usage des indulgences en faveur des défunts!
. concernant le sacrement de la confession, celui-ci, à la suite du Concile Vatican II, est devenu «sacrement de réconciliation» et a pris une forme plus collective et moins personnelle.
Dans l’Église des 1ers siècles, le sacrement de réconciliation était l’aboutissement d’une longue période de pénitence, durant laquelle le pénitent ne communiait plus et cette période était, elle-même, précédée d’une confession personnelle.
. Concernant le sacrement des malades (ou onction des malades), qui était, dans l’Église antique, destiné à apporter aux malades, soutien et consolation face à la maladie, aux épreuves et aux souffrances et, de ce fait, administrée autant de fois que nécessaire, il est devenu, dans l’Église latine, le sacrement de «l’extrême onction» destiné aux seules personnes mourantes et ne pouvant être administrée qu’une seule fois.
. La conception du mariage, dans l’Église latine, est constituée par l’engagement mutuel des 2 époux, le prêtre n’étant alors qu’un témoin et non le ministre du sacrement; les époux sont ainsi eux-mêmes, les «ministres de la grâce du Christ» car ils se confèrent mutuellement le sacrement, en exprimant devant toute l’Église, leur consentement (§1623 et § 1626 du catéchisme de l’Église catholique) alors que dans la tradition première de l’Église, le sacrement est accompli par le Saint-Esprit Lui-même Qui est invoqué par le prêtre qui, par cela, transmet une grâce sacramentelle propre au sacrement du mariage, comme pour tout sacrement.
. Enfin, concernant l’ordination des prêtres, ceux-ci ont eu obligation de célibat, à partir du 11ème siècle, alors que dans l’Église orthodoxe s’est maintenue l’institution du clergé marié et le célibat pour les moines.
F) Remarques concernant la piété dans l’Église latine.
Le développement du culte du corps de Christ qui a été confirmé par une fête (Corpus Christ), à partir du 11ème siècle; cette «solennité du Très saint corps et du saint Sang du Christ» prendra la forme, à partir du 17ème siècle, du «Sacré Coeur» (St Sacrement) donnant à la nature humaine du Christ, à Son corps en particulier, et particulièrement à Ses plaies au moment de sa crucifixion et à Son coeur, une sorte de réalité spirituelle «autonome», séparée de sa nature divine (nestorianisme) alors que les 2 natures du Christ, divine et humaine, lors de Son incarnation dans le monde n’ont jamais été séparées. Rappelons que si les 2 natures du Christ ne sont pas pleinement unies, l’humanité ne peut pas être sauvée.
Seule la communion au Corps ET au Sang du Christ, Dieu-homme, sont source de salut pour l’homme.
G) A propos de la peinture chrétienne.
La vénération des icônes (images) a été proscrite dans l’Eglise latine par le Concile de Francfort, réuni par Charlemagne en 794, pour condamner les décisions du 7ème Concile œcuménique (Nicée en 787).
A partir de cette décision, les arts chrétiens, en particulier la peinture, en occident, refléteront les visions personnelles des artistes, associées aux désirs et aux goût des mécènes, favorisant ainsi la déformation de la foi chrétienne fondamentale.
Actuellement, les icônes ont été ré-introduites dans de nombreuses églises catholiques mais leur présence ne s’accompagne pas d’une vénération théologique juste qui montrerait la différence entre la vénération des icônes des peintures et statuts religieuses présentes dans les églises catholiques.
H) L’Église catholique-romaine depuis le concile Vatican II.
. Une certaine pratique de la synodalité sera réintroduite sans pour autant remettre en question la suprématie du pape dans tout les domaines de l’Église.
. Dans la Liturgie eucharistique, une prière «épiclétique» (demande au Père de la descente du Saint-Esprit sur les dons eucharistique, pour leur consécration) sera ré-introduite, mais malheureusement, elle est placée AVANT les paroles de l’Institution (Ceci est Mon corps, ceci est Mon sang) ce qui ne modifie en rien l’idée latine que la consécration EST EFFECTUÉE PAR LE PRÊTRE LUI-MÊME (in persona Christi) au moment où il prononce les paroles du Christ (Prenez et mangez… buvez en tous…), ce qui est liturgiquement faux.
III) Les divergences avec les confessions chrétiennes issues du mouvement de la Réforme. (Luthéranisme, calvinisme, anglicanisme, presbytérianisme, baptisme,évangélisme, pentecôtisme, adventisme, etc, etc …)
Elles sont aujourd’hui, extrêmement nombreuses et les tendances les plus diverses existent, des plus libérales aux plus fondamentalistes et au sein même d’une même «église» peuvent cohabiter diverses opinions concernant le contenu même de la foi.
Étant historiquement issues de l’Eglise latine, elles ont repris un certain nombre d’éléments altérés, issus de la dite église mais elles ont aussi introduit de nouvelles conceptions.
. Sur le plan doctrinal, elles ont repris à leur compte, le dogme du «Filioque», hérésie profonde de l’Église occidentale mais n’ont pas accepté la suprématie papale ainsi que la doctrine du Purgatoire mais les Luthériens ont introduit une vision de l’après-mort comme étant «une forme de sommeil de l’âme» laquelle âme resterait «inactive» jusqu’à la résurrection ce qui est en parfaite contradiction avec la parabole du Christ sur l’après-vie terrestre (Luc 16, 22 à 31).
Elles n’ont pas, non plus, accepté la doctrine de l’Immaculée Conception, ni de l’Assomption mais au prix de la suppression totale de la vénération de la Mère de Dieu et, a contrario, celle de tous les saints de l’Église.
Assez paradoxalement, les différentes confessions issues de la Réforme ont pleinement accepté la conception augustinienne du péché dit «originel», qui soutient que les hommes seraient tous «fautifs» au même titre qu’Adam et Eve, de notre éloignement de Dieu, initialement.
En réalité, nous portons LES CONSÉQUENCES du péché d’Adam et Eve mais non la responsabilité initiale de celui-ci (1 Cor. 15, 21).
Egalement, le péché ancestral aurait, selon eux, «annihilé» la volonté de l’homme d’où leur vision de la grâce qui, seule, peut sauver l’homme; ainsi l’homme ne collabore pas véritablement à son salut alors qu’Augustin d’Hippone précise clairement que «si Dieu t’a créé sans toi, il ne te sauvera pas sans toi!»
Elles ont aussi fait leur, la doctrine augustinienne de la «pré-destination» qui affirme que Dieu aurait choisi, de toute éternité, ceux qui seraient sauvés et ceux qui seraient damnés; cette conception n’est pas du tout reçu dans l’Église orthodoxe.
Concernant la vie de l’Église, elles ont refusé la conception de la papauté au prix d’une disparition totale de la hiérarchie de l’Église et de ses ministères; leur vision de la synodalité est donc très différente de celle de l’Église des temps apostoliques; elles sont, pour la plupart, indifférente à la valeur de la «succession apostolique transmise par la hiérarchie» et par laquelle s’effectue la communion ecclésiale mais aussi le fondement de la grâce de l’Eglise qui se transmet ainsi.
Ces confessions baptisent également par «infusion», exceptés les baptistes qui baptisent par triple immersion, mais le sacrement de l’introduction dans l’Église ne peut être donné qu’aux adultes.
Concernant le sacrement de l’Eucharistie, excepté dans l’Anglicanisme et le Luthéranisme, il n’y a pas la foi dans la «présence réelle» du Christ dans les dons offerts. L’Eucharistie n’est plus qu’un symbole et un mémorial.
Le sacrement de la confession n’existe pas.
Concernant le mariage, il ne s’agit que d’une bénédiction, celui-ci ayant été, au préalable, contracté civilement et le mariage entre personnes de même sexe est admis dans l’Anglicanisme, le Luthéranisme et le Calvinisme.
Excepté dans l’Anglicanisme, il n’y a plus de clergé et l’ensemble des fidèles est engagé dans le «sacerdoce universel», ainsi, hommes et femmes peuvent exercer un ministère pastoral même s’ils ont une orientation homosexuelle.
Ayant renoncé à la vénération de la Mère de Dieu et des saints, elles ont aussi exclu la vénération des reliques, contre les décisions du 7ème concile œcuménique de Nicée (787).
Enfin, et d’une façon générale, les confessions issues de la Réforme, se fondent sur le principe de de la référence exclusive à la sainte Ecriture (sola Scriptura), considérant que l’interprétation de l’Écriture ne peut être le «privilège» d’un magistère mais relève de la «conscience» de chaque fidèle; en filigrane, c’est la négation de la Tradition de toute l’Église antique, des grands conciles œcuméniques ainsi que de l’importance des écrits des pères de l’Église alors que, pour l’Église orthodoxe, l’Écriture, les écrits des pères ainsi que les décisions des grands conciles définissent la norme de la foi chrétienne et l’ethos chrétien.
Pour l’Église orthodoxe, les évêques ont une qualité particulière pour commenter la sainte Ecriture qui est reliée à leur ordination, en tant que successeurs des apôtres (voir les écrits de l’apôtre Paul à ce sujet (Ac. 20, 28; Phi 1, 1; 1Ti 3, 1 à 7 et 3, 2; Tite 1, 7) car ils ont, dira St Irénée, le «charisme de la Vérité».
En conclusion, on peut dire que les communautés issues du mouvement de la Réforme ont, par certains aspects, réagi de manière légitime contre certaines dérives de l’Église romaine mais malheureusement, au prix d’autre dérives tout aussi graves et même plus graves, ce qui les a éloignées beaucoup plus de l’Église orthodoxe que ne l’est l’Église catholique.
Les conditions de l’Unité des confessions chrétiennes.
« La communion eucharistique, initiée par le Christ, le soir du grand Jeudi, nous a rendus CON-CORPORELS à LUI ET entre tous ceux qui communient à Son corps et à Son sang. (…) Et si tous, nous participons à un pain unique, nous formons un corps unique car le Christ, en effet, ne peut pas être divisé. C’est pourquoi l’Église a été appelée par Paul (1Co 12, 27), «Corps du Christ et nous, nous sommes Ses membres» (…) «En effet, il n’y a qu’un Corps et qu’un Esprit, un seul Dieu et Père de tous» (Eph 4, 2-6).
Cyrille d’Alexandrie (Commentaire sur Jn 11, 11) (P.G. 74).
Pour l’Église orthodoxe, l’unité des différentes confessions chrétiennes ne peut se réaliser que sur le fondement de l’unité de la foi dans le Christ et de la communion au Saint-Esprit.
Il y a des points très importants comme le «Filioque» (procession du Saint-Esprit) ou le statut de l’évêque de Rome qui sont essentiels mais tous les autres points de divergence ne sont pas sans importance car, comme le dit St Jean Chrysostome, «la plus petite altération de la foi a des répercussions sur l’ensemble de la vie de l’Église car celui qui laisse entamer sa foi dans la plus petite partie, l’ébranle toute entière (…)»
Ainsi, les différences dans les formulations doctrinales, manifestent inévitablement les différences dans l’expérience de la foi, on le constate tous les jours.
Tout doit donc être considéré: les fondements doctrinaux, l’organisation de l’Église, la vie liturgique, sacramentelle et spirituelle vécue au sein de la Tradition authentique de l’Église vécue durant le 1er millénaire, celle, dira St Vincent de Lérins dans son Commonitorium, «celle qui a été vécue partout, toujours et par tous».
L’Unité de l’Église, l’Unité entre tous les chrétiens, est le fondement de toute la vie chrétienne; de nos jours, nous sommes totalement incapables d’avoir une date de célébration de la Pâque de façon commune et certains, même, ne la célèbrent pas!
L’Unité est directement liée à l’économie salvatrice du Christ c’est-à-dire rassembler la nature humaine en elle-même et avec Lui comme nous le rappelle solennellement le Christ dans Jn 17, 21: «Que tous soient Un comme Toi, Père, Tu es en Moi et que Je suis en Toi, qu’ils soient en Nous eux aussi, afin que le monder croit que Tu M’as envoyé».
Afin que monde croit que le Christ est vraiment le Sauveur, les chrétiens ne devraient avoir qu’une exigence au fond de leur cœur, le désir de l’Unité; c’est visiblement le cadet de leur soucis si ce n’est une approche toute formelle et peu engageante de cette nécessité.
Tout cela ne peut se faire que dans l’amour mais aussi dans la vérité car si Dieu est amour comme nous le confirme l’évangéliste Jean (dans 1 Jn 4, 16), Il est aussi vérité (Jn 14, 6).
L’amour doit donc toujours aller de pair avec la vérité, de manière non séparée ET INVERSEMENT. Voilà l’essence, le fondement de toute unité chrétienne et c’est une tâche d’importance primordiale et notre indifférence à celle-ci voire son rejet, constitue le plus grave péché contre le commandement divin de l’Unité de tous les chrétiens.
Ainsi, le mouvement œcuménique, apparu au début du 20ème siècle, a permis aux chrétiens de différentes origines et de confessions différentes de se rencontrer et de mieux se connaître, levant ainsi beaucoup de préjugés.
Malheureusement, avec le temps et surtout l’inertie humaine de l’habitude, le dynamisme et la puissance de ce mouvement, certainement inspiré par le Saint-Esprit, est retombé: le mouvement œcuménique est devenu, comme le disait le général De Gaulle à propos de l’Onu, «une sorte de machin» de moins en moins inspiré, très essoufflé où les calculs et stratégies d’églises ont repris le dessus.
Au niveau local, nous n’échappons pas à ce regrettable mouvement et nos relations restent superficielles, trop «affectives», masquant ainsi la faiblesse de nos connaissances théologiques et ecclésiologiques.
Quand on entend des phrases du style «ce qui nous unit est plus important que ce qui nous divise», si elle ne nous entrainent pas dans une profonde dépression, nous font en tous cas comprendre que nos divergences seraient finalement secondaires ou pire, ne seraient dues qu’à des facteurs uniquement géopolitiques, culturels, et pourquoi pas psychologiques et que l’amour, autrement dit la charité, serait le principal moteur de l’unité chrétienne.
Il est certainement tout-à-fait inacceptable de penser que les divisions entre les églises ne seraient que des malentendus tragiques ou pire encore, un manque d’amour mutuel et de compréhension!
Dans quel monde sommes-nous quand on entend ce genre de réflexion!! C’est, en réalité, maltraiter l’histoire et rester dans une sorte de déni des réalités qu’elles nous manifestent et on n’a pas le droit, si l’on est honnête de réduire les divisions des églises à des facteurs non théologiques comme le font si bien ceux qui ne sont pas chrétiens.
Il est donc INDISPENSABLE, pour entreprendre un dialogue, de reconnaître déjà nos différences/divergences respectives.
Une fois encore, les questions doctrinales ne sont plus jamais abordées, au risque de «fâcher, contrarier ou blesser» nos «frères et sœurs dans le Christ ressuscité» et l’on se heurte très vite aux 3 plaies essentielles du mouvement œcuménique actuel à savoir, le relativisme doctrinal, le sécularisme ecclésial, sans oublier les faux procédés en matière d’union tels que l’uniatisme par exemple, qui a d’ailleurs déjà été clairement dénoncé il y a une vingtaine mais qui continue de prospérer dans certaines régions du monde.
L’unité chrétienne ne sera jamais l’assemblage, plus ou moins approximatif, des nombreuses formes historiques ou cultuelles aussi divergentes que contradictoires et le mouvement œcuménique ne devrait pas être autre chose que le laboratoire de la recherche commune de la vérité, toujours dans la charité, dans l’action du Saint-Esprit.
Il nous faut redécouvrir les origines humaines de nos divisions et les moyens divins de parvenir à l’union et distinguer, à chaque étape du dialogue, ce qui est juste, c’est-à-dire en conformité avec la Révélation chrétienne et Sa Tradition, de ce qui ne l’est pas, c’est-à-dire tout ce qui est en contradiction avec celle-ci.
Le chemin vers l’Unité ne peut être qu’un chemin de repentance, de conversion, de renouvellement et de guérison.