L’année “cosmique”, du point de vue astronomique, se compose de 365,25 jours, ce qui correspond à la période de retour du soleil vers les points d’équinoxe et des solstices; mais cela ne donne pas de réponse à l’homme quant au sens de sa propre existence.
Ainsi, la sanctification liturgique du temps est à la base de toute culture car elle donne le sens suprême de toute activité humaine qui s’accomplit devant le Créateur: “il y eût un soir, il y eût un matin, ce fut le premier jour.” (Gen. Ch.1, v. 5).
Dans toute culture traditionnelle, la conscience collective s’organise donc autour du culte, dans une célébration au Créateur, selon la révélation que Dieu donne de Lui-même à ce peuple et ainsi, toute culture ne peut être séparé de la notion essentielle qu’est le culte et c’est au culte qu’est indissolublement lié le temps liturgique, incarné dans les Offices liturgiques et le calendrier qui lui est associé.
Ainsi, l’organisation des sociétés s’effectuera autour de leur calendrier respectif et l’on comprend que tout changement dans organigramme de celui-ci aura des conséquences profondes, non seulement sur le culte lui-même mais encore sur l’ensemble de la vie sociale, familiale et personnelle de la dite société.
Pour exemple, il était demandé aux Pharaons égyptiens, avant qu’ils n’accèdent au trône royal, de ne pas changer le calendrier; cela vaudra aussi pour d’autres sociétés tel que les sociétés chinoise, tibétaine, indienne, thaï, maya, aztèque, qui restent très vivantes de nos jours du point de vue culturel et n’ont pas modifié leur calendrier.
En revanche, ceux qui cherchèrent à rompre par la force, avec la tradition du calendrier de leur société, ne parvinrent pas à leur fin.
Ptolémée III, pharaon égyptien d’origine macédonienne qui voulut, au cours de son règne, en – 238 av. J.C. avancer de 2 siècles le calendrier égyptien, échouera. Egalement, en – 167 av. J.C. Antiochos IV, souverain macédonien de Syrie, adversaire des Juifs, tentera de supprimer leur calendrier ce qui provoquera la révolte des Macchabées.
Jules César lui-même fut assassiné 2 ans après avoir procédé à la réforme du calendrier romain antique;
le calendrier julien est un calendrier solaire utilisé dans la Rome antique qui fut introduit en 46 av. J.C. par Jules César et qui remplaça le calendrier romain républicain; il fut ensuite remplacé en Europe de l’Ouest par le calendrier grégorien, par un “coup de force” du pape Grégoire XIII qui prétendait, non pas remplacer le calendrier julien, mais “l’ajuster”.
Il fallut plus de 3 siècles pour que le calendrier julien, uni au comput pascal alexandrin, devint, au 1er grand concile de Nicée en 325, le fondement du calendrier liturgique de toute la chrétienté.
Les révolutionnaires français tenteront, eux aussi, d’imposer leur propre calendrier durant 14 années (1793 à 1806), en rupture totale avec le calendrier chrétien millénaire mais ils n’y parviendront pas et c’est Napoléon qui supprimera le calendrier républicain.
L’ordre nazi “S.S.”eut aussi son propre calendrier ésotérique, de même que les Francs-Maçons en ont un, avec leur fête principale, au moment du solstice d’été.
L’une des dernières réformes calendaires contemporaines, fut celle que le dernier Shah d’Iran, Mohamed Riza Pahlavi, tenta d’imposer à son peuple; en 1976, il ordonna de compter les années, non pas à partir de la date traditionnelle de l’Hégire, 622 après J.C., début du nouvel an musulman, mais à partir de la date de fondation de la dynastie des Shahs achéménides (559 av. J.C.); après 2 années de troubles en Iran, le calendrier musulman fut rétabli et le Shah contraint de fuir, abandonnant son trône à l’ayatollah Khomeini.
Tous ces grands exemples historiques confirment que tout calendrier est le gardien de la mémoire d’un peuple et de sa culture et qu’il est très dangereux d’y toucher ou bien qu’il faut avoir de très bonnes raisons pour le faire.
La naissance du calendrier liturgique chrétien.
Toute année liturgique (ou année de “culture”) a toujours un début historique qui sera ensuite chronologiquement “actualisé” par le culte inscrit dans le temps liturgique et le calendrier qui lui est associé.
De nos jours, c’est la date de la Nativité du Christ qui sert désormais de référence à la chronologie mondiale et l’on situe tout événement en référence à cette date: ainsi tout événement historique se situera avant ou après la date de la naissance du Christ, l’Incarnation du Logos divin.
Dès le premier grand concile de l’Eglise (Nicée 325), l’année liturgique va progressivement s’élaborer et un calendrier liturgique sera institué, organisant jusqu’à nos jours, la conscience de dizaines de millions de fidèles chrétiens; celui-ci comprendra l’ensembles des fêtes, des périodes de jeûnes ainsi que les jours de commémoraison des saints des églises; au cœur même de ce calendrier se place le cycle pascal qui en constitue le fondement. Le rythme liturgique se divise en 3 parties: le rythme quotidien, le rythme hebdomadaire et le rythme annuel qui s’inscrivent dans le “typikon,”recueil (équivalent des “rubriques”latines) contenant toutes les indications liturgiques en fonction des périodes et des fêtes.
Selon les recommandations canoniques de 1er Concile de Nicée en 325, l’ensemble de l’Eglise du Christ se servait, depuis cette date, dans sa pratique liturgique, d’un système unique de calcul du temps, réunissant organiquement le calendrier julien (de Jules César) au comput pascal alexandrin fruit de la très grande expérience des astronomes égyptiens. Ce système était appelé en occident le “grand cercle”, à Byzance “le grand indicateur” et en Russie “le cercle cosmogonique”.
Il avait également l’avantage d’être en continuité avec le calendrier de l’Ancien Israël, tenant compte du cycle lunaire de telle façon que la Pâque chrétienne soit toujours fêtée après la Pâque juive.
Ainsi était respecté la continuité entre la Loi ancienne et la Loi nouvelle, l’A.T. avec le N.T. lien imprescriptible entre les 2 car le Christ “n’est pas venu abolir mais accomplir”(Mt 5* 17).
Ce lien entre l’A.T. et le N.T. se retrouve aussi dans l’établissement du dimanche, jour de la Résurrection car le Sabbat (samedi), 7ème jour de la Création puis de la chûte de l’homme, précède le dimanche qui est le 8ème jour, le 1er jour renouvelé de la Création, et il serait inconcevable de fêter le dimanche avant ou pendant le Sabbat, de même qu’il est tout aussi inconcevable de fêter la Pâque chrétienne avant ou pendant la Pâque juive.
Ainsi, depuis le 4ème siècle, date de l’établissement de ce calendrier, il n’a jamais été nécessaire de corriger ce calendrier et il indique sans erreur les phases de la lune et le jour de la célébration de la Pâque. Il est un trésor de l’Eglise indivise à tel point que de nombreux astronomes du début du 20ème siècle ainsi que certains pères du concile romain “Vatican II” souhaitaient le retour à ce calendrier, non parce qu’il serait plus exact, car il n’y a pas de calendrier qui soit astronomiquement exact mais parce qu’ils le trouvaient plus commode à utiliser car, dans l’Eglise, l’exactitude astronomique ne présente aucun intérêt; comme le dit l’apôtre Paul dans son épitre aux Galates, “l’Eglise n’est pas là pour observer les temps et les années mais pour fêter le Christ en église.
Ainsi, le calendrier julien permet de toujours fêter la Pâque chrétienne après la Pâque juive mais il permet aussi qu’il y ait la meilleure harmonie possible entre les fêtes “mobiles” (lunaires) du cycle pascal et les fêtes “fixes” (solaires) du sanctoral, à tel point que même après la séparation tragique de l’église romaine avec les églises orthodoxes en 1054, ce calendrier continua à être utilisé pendant plus de 500 années jusqu’à la réforme grégorienne de 1582; il contribua ainsi à maintenir une relative unité entre l’Orient et l’Occident chrétiens laquelle disparut après le “coup de force” du Pape Grégoire XIII confirmant ainsi la division entre l’Orthodoxie et l’église romaine par le “schisme du calendrier”.
La réforme calendaire du Pape Grégoire XIII: naissance du calendrier “grégorien”.
Le 1er canon du St Concile d’Antioche proclame que “tous ceux qui oseront dissoudre le terme du St Synode convoqué à Nicée, en présence du pieux empereur Constantin, ami de Dieu, concernant la Sainte Fête de la Pâque salvatrice, qu’ils soient excommuniés et deviennent étrangers à l’Eglise! Et s’ils persistent à s’opposer à ce qui a été bien défini, qu’ils soient destitués de leur fonction mais également ceux qui oseraient communier avec eux après leur destitution.”
Le motif de cette réforme était religieux car le décalage progressif de la date de l’équinoxe “vénal”(point de jonction entre l’écliptique et l’équateur au moment de l’équinoxe de printemps) dans le calendrier julien faisait craindre que la date de Pâques se déplaçât vers l’été et, 2000 ans après, perdit sa position printanière traditionnelle dans l’année; en effet, au moment de la réforme grégorienne, les dates de la Pâque s’étaient déplacées en direction de l’été de plus de 10 jours par rapport à l’époque du Concile de Nicée et ainsi, cette réforme liturgique faisait revenir la date de l’équinoxe vernal à son ancienne position astronomique dans l’année.
Et c’est en 1582 que le Pape Grégoire XIII décidera, de façon unilatérale, d’avancer de 10 jours le calendrier julien et imposera ainsi à son église, sous l’influence des Jésuites qui voulaient une rupture définitive avec les églises orthodoxes, un nouveau calendrier; avec celui-ci, tous les jours seront décalés (aujourd’hui de 13,5 jours) et, problème fondamental, la date de Pâques ne sera plus en rapport avec la date de la Pâques juive.
En cherchant à corriger ce qui semblait être une perturbation des canons astronomiques de la célébration, l’Eglise de Rome viola la règle liturgique principale de la fête des fêtes: Pâques.
Pourtant, nous savons que le Christ fut crucifié la veille de la Pâque juive, le 14 du mois de Nisan et qu’Il ressuscita le surlendemain de cette fête; c’est dans ces brefs intervalles de temps que se produisirent les événements centraux de notre salut.
C’est pourquoi, les décisions apostoliques, le Saint Concile de Nicée ainsi que les règles du Saint Concile d’Antioche, interdisant la coïncidence des 2 Pâques, confirmées par les 6ème et 7ème grands conciles, avaient insisté sur l’intangibilité de cette règle pour tous les temps.
Or, après l’adoption de la réforme grégorienne, la Pâque catholique, en un siècle (1988-1998), a été célébrée 19 fois avant la Pâque juive et a coïncidé avec elle 4 fois, ce qui fait en tout sur un siècle: 23 fois, soit presque le quart des dates de la Pâque catholique!
C’est pour cela qu’une année plus tard, en 1583, le Patriarche JérémieII de Constantinople, en accord avec le Patriarche Sylvestre d’Alexandrie anathématisa (condamna) ce nouveau calendrier; l’anathème sera confirmé en 1587 avec le Patriarche Sophrone de Jérusalem. Enfin, un concile réunissant les Patriarches de Constantinople, d’Antioche, de Jérusalem et d’Alexandrie condamnera pour la 3ème fois le dit-calendrier par ces mots:”au sujet du rejet du nouveau calendrier, à savoir l’innovation par les Latins concernant la date de la Pâque, nous voulons que ce qui a été décrété par les Pères, à propos de la sainte Pâque salvatrice, reste inébranlable; que tous ceux qui auraient transgressé les prescriptions concernant la sainte festivité de la Pâque salvatrice soient excommuniés et mis en dehors de l’Eglise du Christ.”
L’absurdité mathématique du calendrier grégorien.
Elle doit être aussi mentionnée; en effet, le rythme du calendrier julien est de 3 années simples suivies d’une 4ème année de 366 jours puisque l’année cosmique est de 365,25 jours.
En revanche, dans le calendrier grégorien, ce rythme est perturbé chaque siècle car 100 (années) n’est pas multiple de 4 (100:4= 2,5). Dans le calendrier julien, tous les siècles sont donc bissextiles alors que dans le calendrier grégorien un siècle sur 4 est considéré comme bissextile puisque tous les 4 siècles cela tombera ainsi.
Ainsi, le calcul grégorien introduit la notion de siècle “non bissextile”; mais si l’année bissextile crée un rythme très régulier, un siècle privé de bissexte altère ce rythme: le calcul grégorien transformant 3 siècles bissextiles sur 4 en siècles simples, raccourcit de 3 jours, chaque période de 4 siècles du calendrier julien et cette erreur s’accroit avec le temps.
Egalement, en raison de siècles privés de bissexte, les siècles grégoriens ne comportent plus un nombre égal de jours alors que dans les siècles juliens, il y a toujours un nombre égal de jours grâce au rythme bissextile continu (365, 365, 365, 366).
Il y aura donc, dans chaque siècle julien 36525 jours. En revanche, dans les siècles grégoriens le 1er siècle (17ème siècle) comportera 36525 jours mais les 3 suivants (18ème, 19ème et 20ème siècle) ont un jour de moins (36524 jours par siècle). Et à l’intérieur de chaque siècle cela sera pire puisque les intervalles de temps qui tombent à la fois sur le siècle bissextile et le siècle simple s’avèrent inégaux aux périodes de temps analogues entre des siècles non bissextiles voisins.
Bien sûr,le calendrier grégorien comporte aussi une période composée d’un nombre entier de jours mais si, dans le calendrier julien, un telle période comporte 4 années (ou 1461 jours), dans le calendrier grégorien elle comporte 4 siècles (soit 146097 jours)!
Or, tout système de calendrier se caractérise par un laps de temps plus ou moins long, composé d’un nombre entier de jours après l’écoulement duquel on amortit une certaine erreur par rapport à la durée moyenne de l’année. De ce point de vue, l’église catholique a compliqué le calendrier en introduisant dans la chronologie mondiale une aussi grande période calendaire.
Enfin, la durée moyenne du “siècle grégorien” s’avère égale à un nombre fractionnaire (36524,25), et non un nombre entier, ce qui est absurde du point de vue de la chronologie élémentaire de tout calendrier.
Enfin, si la précision du calendrier grégorien est assez grande par rapport à la valeur de l’année solaire tropique, elle a une marge d’erreur égale à une journée en 3280 ans ce qui décale d’une journée l’équinoxe vernal par rapport à sa véritable valeur astronomique qui ne sera plus le 21 mars mais le 20 mars.
Enfin, concernant l’année lunaire, l’erreur est incommensurablement plus grande: presque comme dans le calendrier juif, tous les 210 ans, les pleines lunes pascales astronomiques grégoriennes devanceront l’équinoxe d’un jour; ainsi, en 1000 ans, les pleines lunes de la 14ème lune, considérées comme les premières après l’équinoxe de printemps, seront les deuxièmes et, de ce fait, la règle du Concile de Nicée sera une fois encore violée et ce, même dans l’interprétation qui lui était donnée par la réforme grégorienne!
Un calendrier “syncrétiste”, ni julien, ni grégorien, adopté par une partie de l’orthodoxie.
La vague d’impiété de la Renaissance, favorable à la réforme grégorienne, mit près de 3,5 siècles pour atteindre aussi l’Eglise orthodoxe. Le Patriarcat de Constantinople fut encore en première ligne pour s’opposer résolument à la propagande catholique et, en 1901, à l’initiative du Patriarche Joachim III, toutes les églises orthodoxes, à l’occasion d’un échange d’opinions sur les questions générales de l’Eglise orthodoxe, se prononcèrent en 1903, à l’unanimité et de façon claire, contre l’acceptation du calendrier grégorien affirmant qu’il n’y avait aucune raison sérieuse, ni ecclésiastique, ni scientifique, pour réformer le calendrier julien; le Concile de l’église russe de 1917-18 à Moscou, confirma cette décision mais le mouvement”église vivante” qui naquit à cette période, noyauté par les communistes, fit une tentative pour introduire le calendrier grégorien qui était devenu, en 1918, le calendrier civil de la Russie soviétique, mais leur tentative échoua.
Il faut cependant se remettre dans le contexte dans lequel fut créé ce calendrier “syncrétique”; au 19ème siècle, la Grèce qui était encore sous le joug ottoman demanda sa liberté nationale aux grandes nations européennes occidentales; pour ce faire, ces dernières lui imposèrent Othon, un roi d’origine bavaroise; celui-ci fit de son mieux pour s’adapter à ses inattendus sujets, des Chrétiens orthodoxes sauf que lui-même était catholique romain. Il confia donc la rédaction d’une nouvelle charte des relations entre l’Eglise orthodoxe et l’Etat à son premier ministre Marurer qui lui non plus n’était pas orthodoxe mais qui était assisté d’un prêtre grec, Théotèke Pharmakides qui avait fait ses études en Europe occidentale et qui était, par ailleurs, un adversaire résolu de l’Eglise orthodoxe en général et du Patriarcat œcuménique en particulier.
Cet homme, profondément influencé par un protestantisme d’obédience anglicane, s’en inspira pour rédiger cette charte. Ainsi, et une fois encore, les saints canons de l’Eglise orthodoxe furent transgressés avec toutes les conséquences que l’on peut imaginer comme l’influence de la théologie scholastique sur la théologie orthodoxe, les représentations iconographiques d’inspiration sulpicienne, etc…
Le Patriarcat de Constantinople publia alors une encyclique inspirée par son Patriarche Mélétios IV élu en 1921, explicitant la théorie dite des “branches”: l’église orthodoxe ne serait, selon cette thèse, qu’une simple “branche” du Christianisme et, pour faciliter le rapprochement avec les autres branches, catholique et protestante, il fallait encourager les églises orthodoxes à adopter, en l’adaptant, le calendrier grégorien de l’Eglise de Rome.
Et c’est en 1924, dans un climat de persécution des Grecs de Turquie, que Mélétios IV, désormais reconnu comme franc-maçon, convoqua par le biais de leur délégué respectif, les églises de Chypre, Serbie, Grèce et Roumanie alors que les Patriarcats de Jérusalem et d’Antioche refusèrent l’envoi de leur délégué, que l’église d’Alexandrie ne répondit pas et que l’église de Bulgarie ne fut pas invitée.
Il ne s’agissait pas seulement, à cette occasion, de la modification du calendrier mais encore de diminuer (voire de supprimer) certains Carêmes, d’abréger certains offices, du mariage des prêtres après leur ordination, d’abolir le port de la soutane, de la suppression du port de la barbe et des cheveux longs; ainsi, la réforme du calendrier faisait partie d’un ensemble d’autres réformes très contestables, mais, fort heureusement, les délégués se ressaisirent et leurs églises rejetèrent celles-ci à l’exception du calendrier syncrétique adopté depuis par certaines églises orthodoxes telles que la Roumanie, Constantinople, la Grèce, l’Albanie, Chypre, la Bulgarie et la Pologne. La Finlande, quant à elle, adopta le calendrier grégorien en totalité. En revanche, les églises de Russie, Serbie, Jérusalem, Alexandrie et Antioche le refusèrent de façon résolue. Dans les églises qui adoptèrent cet hybride calendaire, les opposants subirent de cruelles persécutions.
En 1948, en raison du caractère toujours plus actif du mouvement œcuménique et à l’occasion du 500ème anniversaire de l’autocéphalie de l’Eglise russe, celle-ci confirma solennellement son soutien sans faille au calendrier julien.
Par la suite, Mélètios IV fut chassé de Constantinople par son clergé et ses fidèles, tous indignés; il tenta alors, sans succès, d’accéder au trône patriarcal de Jérusalem mais réussi ensuite à prendre le siège du Patriarcat d’Alexandrie.
Il ne parait pas inutile, au passage, de faire un bref résumé de la vie de ce Patriarche Mélètios IV:
Emmanuel Métaxakis (futur Patriarche Méletios IV), né le 21 septembre 1871, fit ses études au séminaire de la Sainte-Croix de Jérusalem et lorsqu’il devient moine en 1892, prend le nom de Mélèce (Mélétius en latin, Mélétios en grec). Il est bientôt hiérodiacre. Le patriarche de Jérusalem, Damien, le choisit comme secrétaire en 1900, mais en 1908 ce même Damien le renvoie de la fraternité du Saint-Sépulcre, en même temps que l’archimandrite Chrysostome (futur archevêque d’Athènes), pour « agissements contre le Saint-Sépulcre1 ». Mélétios est alors nommé métropolite de Kition à Chypre en 1910.
Lorsque le patriarche Joachim III de Constantinople meurt le 13 novembre 1912, Mélètios propose sa candidature au siège de Constantinople, mais elle est refusée. En 1916, il s’installe en Grèce avec l’appui de Venizélos, chef du gouvernement. Celui-ci l’impose en 1918 comme archevêque d’Athènes, contre l’avis du saint-synode. Lorsque Venizélos quitte le pouvoir en 1920, Mélèce est obligé de démissionner de son siège d’Athènes et part pour les États-Unis en février 1921 et se met à la tête d’un archevêché grec-orthodoxe autoproclamé le 15 septembre 1921. Mais deux mois plus tard, le 27 novembre 1921, il est choisi comme patriarche de Constantinople et se rend en bateau à Constantinople sous drapeau byzantin… Le pouvoir turc ne reconnaît pas son élection.
L’un de ses premiers actes patriarcal sera de placer l’archevêché américain sous sa juridiction, bien que cet acte ne soit pas reconnu par l’Église orthodoxe de Grèce, ce qui provoquera la coexistence de deux juridictions grecques en Amérique. De mai au 8 juin 1923, Mélètios réunit un congrès panorthodoxe à Constantinople afin de réformer le calendrier julien et de passer ainsi du calendrier julien au calendrier grégorien, que le calendrier civil grec a également adopté.
Il met sous sa juridiction, le 7 juillet 1923, une métropole estonienne , prenant acte de ce que l’Église russe est en partie sous le pouvoir des nouvelles autorités bolchéviques. Il fera la même chose pour la Finlande.
Il quitte Constantinople le 10 juillet 1923 sous la pression de ses clercs, et se retire dans un monastère au mont Athos. Il est obligé de démissionner de son siège patriarcal le 20 septembre de la même année sous la pression du gouvernement grec et de l’archevêque Chrysostome d’Athènes, alors qu’au même moment les Grecs sont chassés d’Asie mineure par les Turcs.
Il est élu le 20 mai 1926 au siège patriarcal d’Alexandrie, où il demeure jusqu’à sa mort, 28 juillet 1935. Il fondera un diocèse à Johannesbourg (1928), au Soudan, en Tunisie, en Éthiopie. Il fait aussi construire des églises et appuie des œuvres charitables.
Le site web de la Grande Loge de Grèce le donne comme franc-maçon, membre de la loge Harmonie.
Conclusion.
Adopter le calendrier “syncrétique”, c’est violer immanquablement les règles de l’Eglise orthodoxe concernant la célébration des fêtes et des carêmes prônés par le Typikon.
Les saints Pères du Concile de Nicée n’ont pas cherché pas à fixer la Pâque dans une conception astronomique formelle mais ont constitué, à partir de bases astronomiques cohérentes, un système organique pour le calcul de la Pâque et ce système calendaire génial, élaboré par de nombreux serviteurs anonymes de la foi et de la science en est l’aboutissement pour tous les siècles. Pourquoi devrions nous abandonner un calendrier indissociable de notre vie liturgique qui a donné tant de fruits de sainteté ?
De nos jours, nous ne pouvons que constater les fruits amers de ce calendrier hybride qui entraîna une véritable “anarchie” liturgique au sein des différentes églises orthodoxes alors qu’il parait essentiel, pour des fidèles qui confessent la même foi de célébrer tous ensemble et dans les mêmes moments, les fêtes de l’Eglise orthodoxe, ne formant ainsi qu’un seul Corps et qu’un seul cœur au-delà des races, des nations et des classes sociales car, “en Christ, il n’y a plus ni juifs, ni grecs, il n’y a ni esclave ni homme libre, il n’y a ni homme , ni femme, car tous vous ne faites qu’un dans le Christ Jésus (Gal. 3*28).
Alors que les Juifs ou les Musulmans utilisent le calendrier civil pour leur vie dans la cité, cela ne les empêche nullement d’utiliser leur calendrier traditionnel pour leur vie religieuse; derrière cette querelle du calendrier, c’est toute la tradition orthodoxe que l’on veut remettre en cause et ce n’est pas par souci d’exactitude astronomique que les églises orthodoxes défendent le calendrier julien mais pour toute la vie liturgique, spirituelle et ascétique qui y est associée depuis 2000 ans.
Dans les sociétés traditionnelles qui ont encore un culte, le calendrier y reste associé mais dans les sociétés contemporaines, cette réalité n’a plus de valeur; les citoyens n’ont plus de calendrier, le dimanche devient progressivement un jour comme un autre et ils deviennent des individus sans appartenance avec pour unique but de leur vie, la jouissance factice du consumérisme et l’exaltation de l’individualisme.
Aucun calendrier n’est astronomiquement exact et l’Eglise qui n’est pas un institut d’astronomie, transcende le temps linéaire, déchu, le “chronos” pour vivre dans le kairos, le temps transfiguré qui actualise les grandes étapes de notre salut, car “tout ce qui est né de Dieu est victorieux du monde”
(Jc. ch. i5 v. 4)