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L’attente messianique

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6ème catéchèse paroissiale du 16/01/2022

Les 11 premiers chapitres du Livre de la Genèse, qui est le 1er Livre de la Bible, constituent la « méta-histoire » du monde et de l’homme ; ils n’appartiennent donc pas au genre historique proprement dit. A partir du 12 ème chapitre de ce Livre, on entre vraiment dans l’histoire concrète de l’humanité qui commence par l’histoire d’Abraham.

A) l’aventure d’Abraham.

Celle-ci commence de façon très abrupte (Gn 12,3) : le Seigneur dit à Abraham : « quitte ton pays, ta parenté et la maison de ton père pour le pays que Je t’indiquerai ; Je ferai de toi un grand peuple, Je te bénirai et en toi seront bénies toutes les nations de la terre ». Recevant cet ordre et cette promesse, Abraham n’hésite pas, il part avec son épouse Sarah, son neveu Loth et tous ses troupeaux. Il abandonne donc son pays, sa sécurité et s’ouvre à un avenir totalement inconnu de lui ; il mise désormais sa vie sur ce que Dieu lui a dit dans une obéissance et une confiance en Dieu sans limite. C’est ce que l’on appellera la foi d’Abraham, laquelle est, avant tout un don que Dieu lui fait et auquel Abraham répond en coopérant à l’œuvre que Dieu veut réaliser ; la foi d’Abraham est en fait la même que celle de Marie, la M. de D. mais aussi la même que celle de chacun d’entre nous qui sommes chrétiens.

Quand Dieu nous appelle à Lui en nous accordant ce don immense qu’est la foi, c’est parce qu’il nous choisit car il voit que nous sommes prêts à Le recevoir ; il n’y a pas d’arbitraire en Dieu et il attend de notre part, une réponse à Son appel : c’est le début d’un dialogue personnel auquel seul l’homme peut mettre fin.

Revenons à Abraham : il se met donc en route pour le pays de Canaan (Palestine, Israël, Liban, Jordanie ouest et Syrie ouest, autrement dit la rive orientale de la Méditerranée) et, « de campement en campement » il parcourt le désert du Néguev, l’Egypte, revient au désert du Néguev et poursuit sa route en vivant de nombreuses aventures (lire son histoire dans les chapitres 12 à 25 dans le Livre de la Genèse).

Une seconde fois, Dieu s’adresse à Abraham et lui promet une postérité nombreuse en ajoutant : « Tout le pays que tu vois, Je te le donnerai ». Plus tard encore, Dieu lui répètera la même chose et Abraham Lui répondra alors : « Seigneur, que me donneras-Tu car je m’en vais sans enfant ? » Car Abraham et Sarah son épouse étaient très âgés et n’avaient pas d’enfants.

Dieu parlera encore une 4ème fois à Abraham lui promet une fois encore tout le pays de Canaan mais également un fils ; Sarah étant donc très âgée, avait une servante égyptienne nommée Agar ; Sarah demanda à Abraham de prendre Agar comme femme et celle-ci eut un fils d’Abraham qu’elle prénomma Ismaël ; celui-ci sera plus tard considéré comme le patriarche des Arabes, qu’ils soient musulmans ou chrétiens (Gal. 4, 21 et suiv.).

Il faut aussi noter dans toute l’aventure d’Abraham, au ch. 18, 1-15 du même Livre, une manifestation très mystérieuse que l’on appelle « l’hospitalité d’Abraham » ou encore « l’apparition au chêne de Mambré » ; dans ce passage de la Genèse, il s’agit de 3 personnages à qui Abraham s’adresse, tantôt au singulier tantôt au pluriel ; à l’évidence il s’agit d’une typologie trinitaire (Un en Trois) ; Sarah prépare un repas pour les 3 personnages qu’Abraham sert avec respect et Sarah se cache dans les replis de la tente pour observer et écouter ce qui va se dire entre Abraham et les 3 personnages ; le personnage promet à Abraham que Sarah aura un fils dans quelques mois et en entendant cela Sarah se met à rire ! Pourquoi ? Car Sarah aura, en dépit de son grand âge, un fils qu’elle prénommera Isaac.

B) Le combat de Jacob avec l’ange (Gn 32, 25- 31).

Dans ce passage, Jacob, fils d’Isaac, et petit-fils d’Abraham, rentre au pays, le pays de Canaan, après 20 années d’absence, suite à son différant avec Esaü, son frère ainé ce qui l’a obligé à prendre la fuite ; Jacob conduit une importante caravane et il a 12 fils, ses femmes, ses serviteurs et un nombreux bétail ; il doit faire passer sa famille au niveau d’un gué, le gué de Yabock puis il reste seul pour la nuit.

C’est alors qu’a lieu, à la fois une scène grandiose et étrange de laquelle Jacob sortira à la fois vainqueur et transformé et d’où son peuple, le peuple élu, recevra à travers lui, Jacob (le « supplanteur »), son nouveau nom Israël c’est-à-dire « celui qui a lutté contre Dieu ».

Que s’est-il donc passé à Yabock ? Jacob luttera contre un être mystérieux, une puissance spirituelle inconnue que Jacob veut battre pour s’approprier sa puissance ou, tout au moins y avoir part. Chose curieuse, cet être mystérieux ne peut vaincre Jacob et Dieu n’anéantit pas Jacob parce qu’il L’a défié. Au contraire, Dieu aime l’audace de Jacob, son désir du divin et le Christ nous le confirme : « Depuis J.B. la bonne nouvelle du Royaume de Dieu est annoncée et tout homme déploie sa force pour y entrer » (Lc 16,16) et il plait à Dieu que Jacob dise à l’être mystérieux : « je ne te laisserai pas aller avant que Tu ne m’aies béni » ; l’être bénit alors Jacob et le nomme alors « Israël » ce qui signifie « fort contre Dieu » car Jacob a été fort contre Dieu (Gn 32, 39) et si Jacob est « fort contre Dieu » il l’emportera contre tous les hommes.

Jacob sort donc vainqueur de son combat contre Dieu mais il faut quand même qu’il s’humilie devant la souveraineté de Dieu ; c’est pourquoi l’être le frappe à l’articulation de la hanche et, à dater de cette nuit, Jacob-Israël restera définitivement boiteux.

Quelle conclusion tirer de cet évènement ? Eh bien, que notre désir de Dieu, autrement dit notre prière, soit assez « violente » pour que notre communion à Lui puisse se faire et que, en même temps, comme Jacob-Israël, que nous nous reconnaissions pêcheur, blessé dans notre nature et que de cette  blessure de notre nature, nous reconnaissions qu’il n’y a pas de guérison sans Sauveur. Jacob donnera à ce lieu où il a combattu le nom de Péniel qui signifie « face »car, dit Jacob, j’ai vu Dieu « face à face » et mon âme a été sauvée ; il pourra alors rencontrer son frère Esaü et lui dire : « j’ai regardé ta face comme on regarde la face de Dieu » ; à partir de là, Jacob est donc appelé Israël et ses 12 fils seront des israélites, ancêtres des 12 tribus d’Israël.

Par l’élection d’Abraham, d’Isaac et de Jacob, Dieu S’est choisi un peuple, le peuple d’Israël avec qui Il fonde une alliance pour s’adresser, à travers lui, à toute l’humanité et l’appeler au salut c’est-à-dire à la communion avec Lui.

Toute l’histoire d’Israël est ainsi une lente et difficile montée vers Dieu, avec des hésitations, des révoltes et des infidélités envers Lui mais Dieu restera toujours fidèle à son peuple : c’est toute la problématique de la liberté humaine, constamment mise à l’épreuve de la volonté de Dieu.

C’est d’Israël que le Christ naîtra et c’est pourquoi les chrétiens sont avant tout, fils d’Abraham, d’Isaac et de Jacob, nous sommes des judéo-chrétiens et Paul nous le confirme : « Si vous appartenez au Christ, vous êtes de la descendance d’Abraham, héritiers selon la promesse (Ga 3, 29) et Abraham est le père de tous les hommes de foi.

C) L’onction de Daniel, figure du Messie.

Environ 8 siècles plus tard, le peuple d’Israël qui éprouve le besoin d’un roi terrestre pour le guider, le réclame au prophète Samuel.

Si Dieu Lui-même désigne le roi, c’est Samuel, homme pieux et sage, aimé de tout le peuple qui doit révéler sa mission à celui que Dieu a choisi ; Dieu avait d’abord choisi un homme puissant et beau de la tribu de Benjamin nommé Saül car il défendait courageusement le peuple de Dieu mais son obéissance à Dieu faiblit et Dieu désignera alors à Samuel un jeune homme encore adolescent pour remplacer Saül : ce sera David, le 1er grand roi d’Israël.

Samuel, depuis son enfance, vivait avec le grand-prêtre et il priait Dieu sans relâche ; ses contemporains l’appelaient « le prophète » c’est-à-dire « celui qui parle au Nom de Dieu » ou encore « le voyant », « celui qui connait, qui voit les desseins de Dieu » ; Samuel faisait également fonction de juge dans le pays.

Dieu va donc s’adresser à Samuel et lui dire : « Va à Bethléem car Je Me suis choisi un roi parmi les fils de Jessé ». Quand Samuel arrive à Bethléem, il se rend à la maison de Jessé et demande à voir ses fils ; ceux-ci passent tous devant Samuel sans qu’aucun d’eux ne soit choisi par Dieu ; c’est alors que Samuel demande à Jessé s’il a d’autres fils ; on lui répond que le plus jeune, encore adolescent, garde les troupeaux ; on le fait chercher et c’est alors que Dieu dit à Samuel : « Voici le roi que J’ai choisi ! » Aussitôt Samuel prend la corne d’onction et répand l’huile sur la tête du jeune élu qui reçoit, avec l’onction d’huile, la présence de l’Esprit-Saint, autrement dit les qualités nécessaires au roi du peuple de Dieu pour conduire le peuple dans la fidélité, l’obéissance et la justice et conserver l’Alliance établie entre Dieu et Son peuple depuis Abraham ; David devient ainsi « celui que Dieu a choisi », « l’oint » de Dieu, en grec « Christos » de Dieu et en hébreu « Messie » de Dieu.

L’onction de David sera suivie d’une promesse que Dieu lui fait : « Je fais une alliance avec Mon élu, Je l’ai promis à David Mon serviteur, pour toujours. J’ai fondé sa lignée, Je lui bâtis un trône pour l’éternité…J’ai trouvé David, Mon serviteur, Je l’ai oint de Mon huile sainte…Il M’appellera : Toi, mon Père… et à jamais Je lui garde Mon amour ; Mon alliance lui reste fidèle » (Ps 88).

Par cette promesse, Dieu s’engage à prolonger sa lignée, sa descendance pour toujours, à rendre son trône et son royaume éternels c’est-à-dire qu’un des descendants de David sera supérieur à son ancêtre, que sa royauté aura une autre dimension, la dimension éternelle et c’est ce que confirmera le psaume 44, 7-8 : « Pour toujours Ton trône, ô Dieu, et à jamais le sceptre de droiture, le sceptre de Ton règne. Tu aimes la justice et Tu hais l’impiété, c’est pourquoi Dieu, Ton Dieu T’as oint d’une huile d’allégresse comme à nul de Tes rivaux ».

Et c’est pourquoi David lui-même donnera à son propre descendant le titre de Seigneur en disant : « Le Seigneur a dit à Mon Seigneur : siège à Ma droite jusqu’à ce que J’aie mis Tes ennemis de dessous de Tes pieds » (Ps 109, 1) d’où la question de Jésus aux pharisiens : « de Qui le Christ est-il le Fils ? De David ? Si David L’appelle Seigneur, comment donc est-il son fils ? » (Mt 22, 42).

Ce caractère éternel du règne du descendant de David sera confirmé par le prophète Daniel qui, l’appelant « Fils de l’Homme » dira de Lui : « Son empire est empire à jamais qui ne passera point et Son royaume n’aura pas de fin (Dn 7,14) parole qui sera reprise par l’archange Gabriel annonçant à Marie la naissance de Jésus dans Lc (1, 33) et qui sera reprise par l’Eglise dans le symbole de la Foi ou Credo.

Au chapitre 42 (1-4) de son livre, mais aussi au chapitre 11 (1-2) Isaïe nous révèle le caractère de ce Prince de la paix dont David n’était que l’image, la préfiguration.

Le Christ est donc « Celui sur Qui repose l’Esprit » (Is 61,1 et Jn 1,33) et, ne l’oublions pas, Jésus lira ce texte d’Isaïe dans la synagogue de Nazareth et Se l’appliquera à Lui-même en disant à ceux qui étaient présents ce jour : « Aujourd’hui s’accomplit à vos oreilles ce passage de l’Ecriture » (Lc 4, 16, 21).

Enfin les psaumes 2 et 88 nous révèlent le mystère suprême concernant le Christ.